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Google annonce finalement sa décision de ne mettre un terme à l’existence des cookies tiers à partir de 2023.

Posté le 2 décembre 2021 (mis à jour le 25 avril 2022) – 2 minutes à lire

Que propose le Privacy Sandbox, son grand remplaçant ?

De manière à protéger toujours plus la vie privée des internautes, tout en permettant aux éditeurs de sites web de poursuivre leur activité grâce à la publicité en ligne, Google a mis au point une alternative aux cookies tiers. Cette solution se présente sous la forme d’une suite d’API ouvertes : le Privacy Sandbox.
En effet, ce système novateur vient totalement bouleverser les notions de tracking et de publicité ciblée, telles qu’elles étaient perçues jusqu’alors. Tandis que le cookie tiers permettait de suivre de manière individualisée la navigation de chaque internaute, sa disparition implique qu’il faille trouver une autre manière de cibler la publicité.
En cela, le Privacy Sandbox propose de stocker les données de navigation directement au cœur du navigateur. Les annonceurs ne pourront ainsi y accéder qu’au moyen des API de Google, sécurisées et garantissant l’anonymat de chacun.

 

Quels sont les principes phares du Privacy Sandbox
et qu’en est-il de sa concrétisation ?

 

Créer un web plus sain et respectueux de la vie privée.

Comme l’a affirmé Google en 2019, « nous sommes convaincus qu’avec une itération et des commentaires continus, des mécanismes de protection de la vie privée et des normes ouvertes comme le Privacy Sandbox peuvent soutenir un Web sain et financé par la publicité d’une manière qui rendra les cookies tiers obsolètes ». D’ici à 2023, c’est donc une éradication complète des cookies tiers qui est visée par la multinationale.

Et pour cela, le principe du privacy budget a notamment été mis en avant. Pour faire face au fingerprinting, à savoir le ciblage précis d’un individu au travers de sa navigation et de ses préférences complètes, le fait de mettre en place un privacy budget vient limiter les informations qui pourront être récupérées à travers les API. Avec un budget limité, les sites et Adtech s’en tiendront alors uniquement au strict minimum.

Permettre un ciblage publicitaire anonymisé.

Pour poursuivre le ciblage publicitaire, mais de façon nettement plus respectueuse de la vie privée et des données de l’internaute, Google se base sur deux principes.

  • D’une part, la Federated Learning of Cohorts(FLoC)[1] est une méthode qui consiste à générer des groupes d’individus aux profils de navigation similaires. Le principe est le suivant : chaque personne est catégorisée au sein d’un groupe, lui-même formé selon des centres d’intérêts communs. Tous les individus appartenant à un même groupe recevront ainsi les mêmes annonces publicitaires. Grâce à un Cohort ID, à savoir un identifiant partagé par ces profils similaires, permettant de réaliser ces segments d’audience, Google sera en mesure de permettre un classement one-to-few, par opposition au traditionnel fonctionnement one-to-one. Par ailleurs, les identifiants étant des suites alphanumériques, leur utilisation hors du navigateur en sera largement complexifiée. L’annonceur aura ainsi conscience des centres d’intérêts des groupes, sans être en mesure de définir des profils types.
  • D’autre part, le retargeting grâce à l’API Turtledove (ou tourterelle)[2], permet un tri des internautes selon les pages qu’ils ont visitées. L’idée est ensuite de pouvoir leur proposer une publicité choisie par affinité selon cette navigation, se basant sur le principe du on-device action. Des mécanismes d’enchères sont intégrés à cette logique.
    D’ailleurs, Turtledove est aussi l’acronyme de Two Uncorrelated Request Then Locally-Executed Decision On Victory, autrement dit : deux demandes non corrélées, puis une décision exécutée localement sur la victoire.
[1] https://www.ionos.fr/digitalguide/sites-internet/developpement-web/federated-learning-of-cohorts/
[2] https://ads-up.fr/blog/dovekey-fin-des-cookies-tiers/
Un Privacy Sandbox permettant un suivi aux annonceurs.

Si le Privacy Sandbox se veut pouvoir préserver au maximum l’anonymat et les données des internautes, son but n’est pas non plus d’entraver l’activité des annonceurs. C’est pourquoi la mesure des taux de conversion leur sera fournie. Ces statistiques leur permettront de savoir si leur site a été visité et si leurs produits ont été vendus, afin qu’ils puissent perfectionner leurs stratégies sans pour autant porter atteinte à la vie privée de leurs prospects.

Pour cela, les clics générés seront calculés, ce qui laisse néanmoins entrevoir le même genre de limites statistiques que dans le cadre de l’attribution au dernier clic. Toutefois, l’utilisation des cookies tiers ne sera plus de mise. D’autre part, l’API Aggregated Reporting[1] vise également à permettre de mesurer les taux de conversion, se basant, comme son nom l’indique, sur la génération de rapports agrégés à faire remonter aux annonceurs.

[1] https://github.com/csharrison/aggregate-reporting-api

 

En y regardant de plus près, ces nouvelles mesures alternatives aux cookies tiers ne devraient aucunement faire de tort aux annonceurs, leur permettant une qualité d’insight tout aussi bonne grâce à des reportings bid request pertinents. En effet, une bonne stratégie n’étant pas dépendante du niveau de précision du tracking, cette nouvelle façon d’envisager les choses sera à coup sûr bénéfique tant pour les internautes que pour les petites entreprises de l’adtech.

Sans oublier que la lutte contre la fraude est aussi un cheval de bataille de Google dans son projet de Privacy Sandbox. Une autre de ses API est donc celle de Trust Tokens, pour y faire face sans plus avoir à requérir à l’utilisation de cookies tiers. Concrètement, elle garantira aux annonceurs la visibilité réelle de leurs publicités, sans toutefois leur donner l’accès à l’identité ou aux données personnelles des internautes.

Ainsi donc, les bots pourront être différenciés des internautes réels, en utilisant une technique similaire à celle du captcha.

 

Un projet qui présente limites et oppositions.

A travers son projet de Privacy Sandbox, Google s’attaque à un certain nombre de problématiques fondamentales, tout en proposant une alternative prometteuse et concrète. Toutefois, si les idées sont fortes et nous laissent envisager un futur viable sans le moindre cookie tiers, il n’en demeure pas moins que 2023 approche à grands pas. D’importants doutes subsistent donc quant à la potentialité de ce que donnera réellement ce projet, qui affiche bien des complexités techniques.

Sans oublier le fait que cela donnerait un grand pouvoir aux navigateurs, qui auraient bien du mal à être contrebalancés. Les éditeurs européens, quant à eux, sont tout aussi frileux à cette idée. Comme l’ont affirmé l’Association Européenne des Médias Magazine et l’Association Européenne des Editeurs de Journaux, un risque majeur pèse sur l’économie numérique, à travers les décisions relatives au Privacy Sandbox. Selon eux, la modification du ciblage publicitaire basé exclusivement sur les navigateurs, reviendrait à donner tous les droits à Google. En effet, le navigateur étant le seul à pouvoir traiter et comprendre ses données, nul autre acteur n’aurait la possibilité de le faire.

La mise en place du Privacy Sandbox se concrétisant au fil du temps, il reste un certain nombre de questions qui se posent.

Dans ce cadre, un ensemble de navigateurs se sont prononcés contre le ciblage par cohortes, dont Brave en tout premier lieu, jugeant ce système comme ne respectant pas la vie privée de l’internaute[1]. Ont suivi les navigateurs Vivaldi et Firefox, entre autres. Et si le FLoC a tout de même été activé par Google au début de l’année 2021, ce choix ne fait pas l’unanimité. Par exemple, l’Electronic Frontier Foundation s’y est fermement opposée :

« Nous rejetons catégoriquement l’avenir de FLoC. Ce n’est pas le monde que nous voulons ni celui que les utilisateurs méritent. Google doit tirer les bonnes leçons de l’ère du suivi par des tiers et concevoir son navigateur pour qu’il fonctionne pour les utilisateurs, pas pour les annonceurs »[2].

S’il faut donc retenir plusieurs points relatifs au Privacy Sandbox, notons un désir de protection des données défendu par Google. En se servant de sa suite d’API ouvertes, le navigateur sera donc le seul détenteur des informations de navigation, filtrées avant d’être partiellement retransmises aux annonceurs. En conclusion, la publicité ciblée sera désormais anonyme, grâce à la suppression des cookies tiers dès 2023. Cela dit, il demeure un certain nombre d’acteurs s’opposant au projet tel qu’il est en l’état, contestant la légitimité de certaines des décisions de Google. Il nous reste désormais à voir quelles seront les prochaines étapes dans la mise en place concrète du Privacy Sandbox !

[1] https://brave.com/why-brave-disables-floc/
[2] https://www.01net.com/actualites/google-active-le-floc-son-alternative-aux-cookies-tiers-pour-la-publicite-en-ligne-2039989.html

 

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